Vendredi 29 août aux Portes de la Mer, nous présentions Contes sur l’envie d’Elle et le désir de Lui, par Corinne Casabo, d’après le Livre des Amours d’Henri Gougaud.

Nous n’étions qu’une petite vingtaine aux « contes de l’envie d’elle et du désir de lui » racontés par Corinne Casabo. Cela n’a pas empêché d’inattendus et vifs échanges à l’issue de la représentation. Si certaines personnes se sont délectées de ces contes primitifs de tradition orale, mis en langue écrite par Henri Gougaud, d’autres personnes ont été heurtées voire choquées par certains d’entre eux. Au point d’estimer honteux de diffuser de tels contes à l’époque du Procès Mazan et de Metoo.

En effet, ces contes mettent en lumière le fait que le patriarcat, la chosification et l’infantilisation des femmes existe de tout temps et ce, aux quatre coins du monde. Mais ces histoires libèrent aussi : le désir féminin y est exprimé autant que le masculin, et le divin s’y réconcilie avec la sexualité. L’amour n’y est plus amputé des plaisirs charnels condamnés par les religions s’ils ne sont pas sources d’enfantement.

L’art est toujours le reflet d’une société quelle que soit son époque; il semble qu’à cette « enfance du monde », notre rapport à la sexualité était plus joyeux, libre et moderne. Un conte dans « le livre des amours » – que je vous invite à lire et dont sont tirés ces textes – évoque la transsexualité : « Comment le Fripon se fit femme ». L’audace, l’intelligence et la créativité de la femme sont également célébrées dans d’autres contes, « Les feuilles sèches » par exemple. Si la culture patriarcale et religieuse n’avait pas accru sa domination et ses carcans hypocrites au cours des siècles, toutes les horreurs, pédophilie, incestes, viols, féminicides… seraient peut-être moindres de nos jours.

D’aucun·e·s auront entendu ces contes sous le prisme de la lutte féministe si longue et si rude, d’autres n’auront retenu que la liberté et l’humour, la jubilation de la langue crue et poétique. Oui, nous avons besoin de nouveaux récits, mais pas en censurant ceux des origines du monde humain.

Il est toujours intéressant qu’un spectacle, si modeste soit-il, crée une polémique. La conteuse a su toucher le public et engendrer des réactions quasi épidermiques d’adhésion ou de rejet. N’est-ce pas là le rôle de l’Art ? Qui nous oblige à nous questionner, à réfléchir et à nous (re)positionner… Aucun regret donc, au contraire. C’est ainsi que s’apprend, s’exerce l’art d’exister ensemble avec nos différences, nos forces et nos vulnérabilités.

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